Bien. Il est 15 heures et vous souhaitez valider votre loto dans un tabac qui se trouve être de l’autre côté de l’avenue. Alors que vous arrivez au coin de la rue : shlplocckk! Une crotte de pigeon vient de vous tomber sur l’épaule droite. Vous maudissez l’odieux volatile qui préfère s’éloigner d’un vigoureux battement d’ailes au cas où vous seriez tenté de le poursuivre. Alors que vous passiez votre beau mouchoir blanc sur votre épaule droite, votre talon droit se dérobe, et vous vous rattrapez tant bien que mal à votre voisine de gauche qui passait en sens inverse. Voisine qui vous insulte sans comprendre l’objet de votre désarroi, et sans entendre vos plates excuses puisqu’elle a des écouteurs incrustés au fin fond de l’oreille interne tel un mollusque scotché sur son rocher -comme presque la moitié des badauds que vous croisez d’ailleurs…
Vous jetez un œil sur votre chaussure, et vous comprenez qu’un chien probablement complice du pigeon avait déposé son obole sur le trottoir, bien aidé en cela par le propriétaire qui n’était pas muni de son petit sac, et qui a certainement l’habitude de faire sa petite commission dans son salon. « Chaussure crottée à rainures, ô joie que cela procure » comme disent les habitants de Crottes-en-Pithiverais dans le Loiret !
Look left, look right, look around
Une insulte plus tard, lancée par un cycliste indélicat roulant sur le trottoir en se prenant pour Attila sur son destrier, les écouteurs incrustés au fin fond de l’oreille interne tel un photographe agglutiné sur les marches du palais du festival de Cannes, vous tentez d’avancer derrière les passants dont la plupart, cigarettes à la main, vous empoisonnent à petits feux. Vous regardez à gauche et à droite afin de vous assurer que personne n’emprunte la piste cyclable… C’est bon, mais vous venez de faire seulement 5 mètres et déjà des gouttes de transpiration perlent sur votre front plissé d’inquiétude.
Vous faites attention en traversant car le feu piéton vert ne veut pas dire que vous êtes en sécurité. Non ! Il est possible de voir passer à tout moment – plus du tout concernés par les feux tricolores, merci Bertrand – un cycliste ou deux, écouteurs incrustés au fin fond de l’oreille interne tel des joggers entassés au départ du marathon de Paris. Il y a même des automobilistes qui, sans gênes, franchissent le passage piéton sans complexe – vus mais pas pris – un téléphone incrusté sur l’oreille tel un chewing gum étalé sur la chaussure. Une fois passé sur la berge opposée votre temps de survie est décompté, tic tac…Attention au tramway qui vous fait sursauter par son avertisseur qui indique comme le voyant en atteste que vous n’avez pas le droit de passer. Et un tramway pouvant en cacher un autre, vous piétinez d’impatience.
Un jour sans fin
Le même principe s’applique alors pour la moitié de l’avenue tel un miroir réfléchissant votre détresse. Automobiles, cyclistes, rollers, motos, poussettes, patinettes, mobylettes, joggers etc. défilent devant vous (on se croirait dans un film de Tati), et c’est en miraculé que vous parvenez enfin au bureau de tabac.
Il y a fort à, parier qu’à force de tourner la tête et les yeux dans tous les sens, le piéton se transforme avec le temps. Je l’encourage même à effectuer sa mutation rapidement afin d’éviter sa disparition comme les dinosaures avant lui. Revenez dans 100 ans Mesdames, Messieurs ! En plus de la peau légèrement verdâtre et rêche – comme les caméléons – vos yeux se transformeront et seront circulaires en se déplaçant de façon indépendante et dans tous les sens en avant, en arrière, en haut et en bas – c’est charmant – afin d’assurer une meilleure sécurité. Sourd comme un pot les oreilles seront 4 fois plus grosses pour laisser passer des écouteurs gros comme le poing. Et comme disait Darwin : " Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, mais celles qui s’adaptent le mieux au changement " Alors qu’est que l’on attend ? Le changement c'est maintenant !
Et pour compléter cet aricle, regardez le très bon sketch des "Décaféinés" à propos des petits personnages rouge et vert sous les feux tricolores.
Les décaféinés – Ondar
Marc / Humanvibes ( sur une idée originale de Nicole)