Interview d'Alexia Germont : Porter la voix de la société civile (1/2)
MB(2019) – Alexia Germont
1ère partie de l'interview
Alexia Germont, bonjour. Vous êtes la fondatrice et Présidente du Think Tank, ou de ce que l’on appelle un groupe de réflexions, appelé France Audacieuse issu de la société civile. Vous avez été avocate, et mené parallèlement votre carrière professionnelle au sein d’une entreprise et vous êtes auteure du livre "Réveillons notre Europe" en octobre 2018 aux éditions Temporis. La définition du mot audacieuse est : une personne qui prend des risques. Et vous, quels risques avez-vous pris en créant le laboratoire d’idées France Audacieuse ?
Beaucoup de risques ! J’ai pris celui de la liberté de ton hors des partis politiques traditionnels à un moment où on est axé uniquement sur la communication. J’ai fait le pari que de travailler sur le fond des idées, un jour cela porterait ses fruits.
Danton qui était avocat a dit cette phrase restée célèbre lors de l’une de ses allocutions le 02/09/1792 "De l'audace, encore de l'audace, toujours de l'audace". Il y a du Danton en vous ?
Non…non. Je suis plus calme que Danton ! Enfin je l’espère ! (Rires.)
Vous avez déjà pensé à participer à un concours d’éloquence ?
Oui, mais je l’ai déjà fait par le passé, c’est l’essence même du métier d’avocat que j’exerçais par le passé. C’est la force du verbe, la capacité à toucher là où cela fait mouche à la fois par la force des idées mais aussi par l’élégance de la pensée et de sa mise en musique…
Que répondez-vous à ceux qui estiment que les Think Tanks ne seraient ni plus ni moins que des lobbys qui confisqueraient le débat démocratique aux corps intermédiaires ?
France Audacieuse est tout sauf un lobby… c’est un laboratoire d’idées indépendant qui repose sur la capacité de travailler ensemble de façon transpartisane, ce qui demande de l’audace bien sûr, et une certaine ouverture d’esprit. Ce que je trouve justement intéressant dans l’exercice, c’est la capacité de se remettre en question et de pouvoir s’ouvrir vers des horizons différents des vôtres. En matière de lobby, vous faites référence probablement aux think tanks anglo-saxons qui ont des moyens considérables qui font que, peut-être, à un moment donné ils sont dans cette position de lobbying. Mais quand vous portez un projet comme le nôtre, qui aujourd’hui n’est financé par aucune société mais seulement par des particuliers, je vois mal comment nous pourrions être un lobby.
Sur Humanvibes, nous sommes sensibles à tout ce qui touche au développement personnel comme l’Ikigai dernièrement, et maintenant que vous intervenez régulièrement dans les médias comme par exemple dans l’émission "Les Informés" sur France-Info de 20h à 21h, qu’est-ce q"ue cela vous a apporté dans votre vie de tous les jours ?
Cela aide tout d’abord à maitriser le fond des sujets vous ne pouvez pas être performante dans votre parole médiatique si vous ne connaissez pas parfaitement les dossiers dans leur intimité. Ensuite, il faut développer une capacité de convaincre en étant à l’écoute de l’autre. Enfin, c’est aller à la rencontre de la sphère journalistique que je ne connaissais pas. C’est toujours intéressant.
Et difficulté supplémentaire d’intervenir en direct, je suppose ?
Tout à fait, c’est être dans l’immédiateté, c’est essayer de donner le meilleur de soi-même dans un temps très court. Il faut apprendre à avoir l’esprit de synthèse sur des interventions qui peuvent ne durer que quelques minutes et parfois batailler parce que lorsque vous êtes deux, c’est plus facile d’avoir un échange d’idées, mais à quatre intervenants vous devez être à la fois très respectueuse de chacun mais exister sur cette "scène" qui ne vous est pas forcément favorable au départ.
Vous connaissez les sujets qui vont être abordés à l’avance ?
Cela dépend, en général on connait le thème des sujets, mais jamais les questions bien sûr, et l’on est au courant environ 2 heures avant le début de l’émission, donc l’exercice n’est pas aussi simple qu’il n'y paraît.
Et de fréquenter toutes sortes de personnalités médiatiques, cela doit-être particulièrement enrichissant ?
Oui, dernièrement j’ai eu à débattre avec un gilet jaune : je n’étais pas sur la même ligne que la sienne mais l’intérêt a été d’échanger de manière audible et constructive. Lorsqu’il s’agit de débattre avec des représentants de la classe politique plus traditionnelle, le prisme n’est pas le même que celui de la société civile qui a une tonalité différente avec une approche beaucoup plus pragmatique. Parfois on se rencontre, et parfois nos avis divergent tant sur le fond que sur la façon dont on appréhende les sujets.
Sentez-vous chez ceux que vous croisez, leur regard posé sur vous qui est maintenant différent ?
C’est difficile de répondre à cette question…Non. Peut-être que d’avoir écrit mon livre "Réveillons notre Europe" qui force donc à poser sa pensée sur des sujets complexes, aide à acquérir plus de légitimité. Mais je dirais qu’il y a 2 sujets distincts : Celui de la légitimité, et celui de la notoriété. Du point de vue de cette dernière, cela ne change pas grand chose : vous êtes simplement un peu plus visible au sein des personnalités de la société civile qui s’expriment dans le débat public, donc la notoriété est assez faible en réalité. En revanche, pour la légitimité des prises de paroles, plus vous intervenez dans des formats d’expression variés, comme des émissions grands publics, des tribunes, des livres, ou des réunions partout en France, je pense que cela participe à l’accroissement de cette légitimité sur les dossiers, oui.
Au siècle dernier Charles Handy* lançait déjà : "Le leader de demain devra avoir une approche plus féminine. Il devra convaincre de faire plutôt que de donner des ordres." Qu’en pensez-vous ?
Oh ! Ça me parle. Et plus on vieillit, plus ça me parle (Rires.) Tout d’abord quand on est jeune, je trouve que l’on compense le manque de confiance en soi parfois par des perceptions très intellectualisées de la vie, et souvent par une approche plus clivante. En vieillissant, on acquiert de la maturité et l’intelligence collective nous parle plus. Quand on arrive à être sûr de son enracinement intellectuel, il est plus facile de travailler avec les autres, et plus ils sont brillants mieux c’est. En ce qui concerne une approche plus féminine, je fais partie de cette génération qui a eu la chance de bénéficier du féminisme sans avoir à se battre pour. La patte féminine, par nature, ne doit pas être en opposition avec l’approche masculine mais en revanche elle vient bien la compléter, et je pense qu’il y a des sujets où l’on est très intuitive. Cela me va bien de le revendiquer. Nous avons peut-être moins besoin de prouver que l’on est le chef de meute…(Sourires.)
Que feriez-vous passer comme message aux hommes et aux femmes qui souhaiteraient s’investir comme vous dans des actions autour de notre modèle social, politique et culturel français ?
C’est très difficile. Le chemin est très long, semé d’embuches et pas forcément celles que l’on anticipe. Au début, on a une énergie considérable parce qu’il en faut vraiment beaucoup, et dès lors que vous prenez la parole et exprimez vos idées dans le débat public, vous vous heurtez à des personnes qui ne pensent pas comme vous. Vous vous exposez à la critique en permanence, et surtout en ce moment où il y a beaucoup de violences sur les réseaux sociaux, on met plus facilement l’accent sur le dénigrement à tort ou à raison, plutôt que de mettre en avant ce que vous faites de positif. Il faut donc être à l’écoute, ce qui peut vous amener à faire bouger votre réflexion, accepter que vos mots puissent être mal compris pour de multiples raisons, et se couvrir d’une carapace pour se protéger des coups.
Ah oui, carrément !
Oui, parce que c’est vraiment difficile de se mettre à nue, alors que votre engagement est à titre bénévole et qu’il faut accepter d’être sous le feu des critiques très régulièrement. Mais je vous rassure, vous avez par ailleurs des moments de grande joie, c’est ce que j’appellerais des flashs, des éclairs, de grande satisfaction quand vous réunissez une salle de 200 personnes et que vous sentez que les échanges que vous avez eus ont finalement fait avancer le débat. C’est réconfortant quand vous faites des rencontres lumineuses avec des personnes que vous n’auriez jamais eu l’opportunité de découvrir, tout cela vient effacer les difficultés de votre engagement.
Fin de la 1ère partie
Propos recueillis le 07/03/19
Dédicace d'Alexia Germont pour Humanvibes dans son livre " Réveillons notre Europe" aux éditions Temporis
Et pour aller plus loin :
Lien vers la suite et fin de l'interview d'Alexia Germont sur Humanvibes
Lien vers l'interview "Du Tac au Tac" d'Alexia Germont sur Humanvibes
Site officiel de France Audacieuse
http://www.franceaudacieuse.com/
Blog d'Alexia Germont
Site des éditions Temporis
http://editions-temporis.com/catalogue/souscription/
Alexia Germont interviewée au journal de RT France le 21/01/19 sur l'Europe à propos du Brexit
RT France(2019) – Youtube
Débat sur Public Sénat "Le match des idées" avec Alexia Germont le 06/03/18 à partir de 29m et 14s
Public Sénat(2018) – Youtube
Marc / Humanvibes
Publié le 19/03/19