Amélie + Marion = de la Patagonie à l’Alaska

Amélie + Marion = de la Patagonie à l’Alaska

 

                                                                                        Amélie + Marion = de la Patagonie à l'Alaska

 

Amélie + Marion = de la Patagonie à l'Alaska

Amélie et Marion Laurin –  Jusqu'au bout de la terre  – City éditions

 

Votre vision des rapports entre les sexes a-t-elle été modifiée après votre voyage ? Y a t-il eu des situations qui auraient pu tourner différemment si vous aviez été des hommes ? Cela a-t-il amélioré votre capacité à cerner les personnes ? Comment le fait d’être des femmes de nationalité étrangère a-t-il modifié vos relations ?

Et en tant que femmes, finalement êtes vous confrontées à plus de difficultés de façon générale en France que lors de vos traversées des différents pays étrangers ? Et si oui quelles sont-elles ?

 

"If you show me your boobs, I’ll bring you to Idaho !" Ce redneck croit vraiment qu’on va accepter de lui dévoiler notre anatomie pour avancer de quelques kilomètres ? Apres 18 mois de voyage en auto-stop en Amérique latine et en Amérique du Nord, on en a entendu de bien belles, mais cette fois-ci c’est trop (drôle), Amélie s’extirpe de la voiture en se tordant de rire et laisse à sa sœur Marion le soin de décliner l’alléchante proposition.

Au début de ce périple entre sœurs, on a vite compris qu’il allait falloir faire avec ce genre de situations. Et elles se sont succédées ! On ne pouvait pas changer les pensées de ces hommes, mais par contre, on pouvait changer notre façon de réagir à leurs avances. On est passé d’énervées voire dégoutées à une stratégie beaucoup plus simple : la clarification des choses. Ça déconcerte parfois, nous donne une image plus assurée aussi. Ils réalisent qu’ils n’ont pas toujours la main. Quand il vaut mieux, on esquive simplement aussi.

  Au fil des kilomètres et des rencontres, on a amélioré notre capacité à cerner les personnes. Au début, souvent prises d’impatience, on montait avec le premier qui voulait bien s’arrêter. Après quelques désillusions et petites frayeurs, on s’est dit qu’il fallait mieux analyser la situation avant d’accorder notre confiance ou non, quelques secondes pour décider de notre destin. Dans notre récit de voyage Jusqu’au bout de la terre on écrit "Les trois occupants édentés d’un camion immatriculé au Paraguay ne nous inspirent pas confiance. Ce n’est pas tant leur hygiène dentaire négligée qui nous effraie mais plutôt leurs pantalons grands ouverts. Avant même qu’ils aient pu formuler leurs intentions, nous jouons les imbéciles et prétextons vouloir aller dans la direction opposée, histoire de refuser poliment. Nous devenons chaque jour plus intuitives."

Ensuite, on a appris à adapter notre discours, notre attitude en fonction des personnes avec qui on était. L’argent, le sexe, et parfois la famille sont des sujets à éviter. Face à certaines personnes, on est même devenues mythomanes en s’inventant des maris, des itinéraires, des métiers. Amélie, photographe, s’est temporairement inventée fleuriste pour ne pas attirer l’attention sur son matériel. Bien sûr, on jugeait l’apparence et l’attitude, mais le plus important était l’instinct. Et parfois on s’est trompé. Au Nicaragua, ce camionneur qui s’était arrêté sur un terrain vague isolé pour faire le plein d’essence de contrebande n’avait sans doute pas de mauvaises intentions, mais on s’est méfié et on a préféré partir.

La "femme qui voyage", être avide de connaissance et de liberté, n’est pour certains hommes qu’une femme à qui le respect n’est pas chose due. Pour beaucoup, deux possibilités : soit elle est mariée et elle est donc passée outre l’autorisation de partir qu’elle doit demander à son mari (pourquoi la lui accorderait-il ?), soit elle est célibataire et c’est donc, de toute évidence, une fille facile (car pourquoi voyagerait-elle seule sinon ?). Manque d’éducation ou mauvaise habitude culturelle, le rapport entre les sexes en Amérique Latine est bien souvent déséquilibré. C’est le cas partout dans le monde ? C’est vrai, mais durant notre voyage on l’a clairement ressenti.

On s’est rendue compte que la voyageuse porte une pancarte invisible sur laquelle certains y voient inscrit "je suis dévergondée", et se donnent par conséquent le droit de lui manquer de respect. Bien heureusement, tous les hommes ne se comportent pas si mal.

Certains nous avouaient avoir accepté de nous aider de peur que nous tombions sur une personne malintentionnée. Ils auraient sans doute laissé des hommes se débrouiller.

Il nous est difficile de savoir si nous aurions eu autant de facilité en étant des hommes, mais une chose est sûre, certains voyageurs (et voyageuses) que nous avons croisés avaient pas mal de difficultés à avancer. Nous pensons que ce n’est pas tant le sexe du voyageur qui conditionne la réaction des gens, mais aussi son attitude. Comment se faire inviter dans l’habitacle d’un parfait inconnu si on est vautré sur son sac, l’air passif et désespéré ? Nous avons choisi de faire les femmes fortes, dynamiques et décidées, et nous avons avancé relativement rapidement (parfois même plus rapidement qu’en bus !).

Cela dit, si nous étions des hommes, certaines situations auraient sans nul doute été différentes. Ce couple de sexagénaires californiens aurait-il accepté que nous montions à bord de leur voiture ? Nous auraient-ils invitées à dormir chez eux ? Être des hommes aurait-il fait de nous des personnes en qui on ne peut pas avoir confiance ?

En revanche, le patron de cette auberge mexicaine ne nous aurait à coup sûr par permis de séjourner gratuitement dans son établissement, ni même invitées à aller camper avec lui et son ami, mais si tel était le cas, ils ne nous auraient pas non plus fait d’insistantes avances le soir venu et l’alcool ayant fait effet. Ils n’auraient pas essayé de se partager le “butin”, comme ils l’avaient d’ores et déjà décidé : "Je prends celle-là, toi tu prends l’autre". À être des hommes on aurait vécu un voyage bien différent, ayant loupé les mauvaises rencontres comme les belles, les cons comme les bons.

On aurait sûrement préféré ne pas croiser le chemin de certains, mais ce n’est ni la première fois, ni la dernière, que nous sommes confrontées à l’inégalité. Dans les voyages à travers le monde, comme de retour dans la vie quotidienne dans un pays qui se prétend égalitaire, on entend le même genre de remarques. Dans l’imaginaire collectif, une femme est bien plus qualifiée à faire des machines à laver et la cuisine que la plomberie ou la mécanique. Récemment, alors que nous aidions un ami à poncer et à peindre l’extérieur du restaurant qu’il vient d’acquérir, combien de remarques sexistes avons-nous entendu ? "C’est les femmes qui peignent maintenant ? Il n’y a pas un homme pour vous aider ?"

Les femmes font face, en voyage comme chez elles, à pas mal de difficultés et de préjugés. Avec le temps, les choses changent, mais le sexisme subsiste malheureusement. Il faudra encore plusieurs générations, voire des siècles, qui sait, avant que l’être humain masculin ne considère son homologue féminin comme ayant le même droit au respect.

 

Amélie & Marion Laurin – 2016 –  pour Humanvibes

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Carte du voyage d'Amélie et de Marion

Amélie + Marion = de la Patagonie à l'Alaska

      Amélie et Marion Laurin –  Jusqu'au bout de la terre

 

Et pour aller plus loin :

 

Thalassa – La patagonie, nature extrème

Patagonie, nature extrême -Thalassa(2015) – Youtube

 

Echapées Belles – l'Alaska

Alaska, là où le soleil ne se couche jamais  – Echappées Belles(2015) – Youtube

 

Marc / Humanvibes

 

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