Affiche "Fabrice Luchini et moi" au théâtre l'Archipel
Olivier Sauton
Oliver Sauton, merci de recevoir le site Humanvibes…
C’est moi qui vous remercie.
Je viens de voir votre spectacle, et c’est assez curieux car j’ai l’impression de voir 2 personnes dans votre loge, donc je ne sais pas si Fabrice Luchini va surgir d’un moment à l’autre !
Et bien il peut venir à tout moment ! Luchini dit à un moment dans le spectacle "même quand je ne suis pas là, je suis toujours là". Il est toujours à coté de moi depuis que je l’ai vu pour la première fois à la télé, c’est une sorte de compagnon imaginaire. Les enfants ont des amis imaginaires, et bien moi j’ai un compagnon imaginaire qui s’appelle Fabrice Luchini.
Donc si je vous dis : "J’ai toujours adoré ce que vous faites, vous êtes mon fan". Cela vous dit quelque chose ?
C’est la première phrase que j’ai prononcée à Fabrice Luchini quand je l’ai rencontré à 3 heures du matin il y a 17 ans. C’était dans le 9ème arrondissement, j’avais 20 ans et je m’étais inscrit à des cours de théâtre après avoir quitté Angers ma ville natale, où j’avais quitté la fac de droit également. J’ai fait des petits boulots, et après 2-3 mois, boum ! je tombe en pleine nuit sur celui qui a déclenché ma vocation. Je suis allé vers lui, et je l’ai complimenté, et je lui ai demandé de me dire une fable de La Fontaine et c’est comme cela que tout a commencé.
Vous parlez de vos 20 ans, et j’ai lu qu’à cet âge vous avez vu Don Juan pour la première fois au théâtre. Qu’avez-vous fait avant cela ?
Avant ? … J’ai du mal à répondre à la question… La première fois que je suis allé au théâtre à 20 ans voir Don Juan, j’ai eu l’impression que cela était le premier jour de mon existence.
"Le premier jour du reste de ta vie", comme dans le film ?
C’est cela. C’est exactement cela. J’ai compris ce que j’allais faire toute ma vie à 20 ans seulement. Avant, je pensais beaucoup à moi, je m’ennuyais, je rêvais d’être sportif mais en me regardant dans la glace j’ai su que cela allait être difficile. Mais je voulais écrire depuis l’adolescence, je voulais être un romancier. J’écrivais beaucoup de poèmes comme tous les adolescents, mais j’avais vraiment le souci du style, même si cela était très mauvais, mais je n’écrivais pas juste pour me défouler. Je savais que j’allais écrire, mais à 20 ans pendant cette première pièce de théâtre, ce qui est assez tard d’ailleurs, j’ai compris dès les premières secondes que c’était ce que je voulais faire. C’était évident. C’est là où j’ai tout quitté : les études, le cocon familial, pour Paris en mode Rastignac !
J’ai vu que vous aviez joué une pièce de Patrick Hernandez "Son mec à moi"pendant un an au théâtre Galabru et Parmentier. Je ne savais pas que le chanteur avait écrit une pièce ?
Aahhh aahh (Rires) C’est un homonyme ! Ce n’est pas l’auteur de "Born To Be Alive" ! Patrick Hernandez est un auteur qui écrit beaucoup de comédies comme celle ci sans prétention, et c’est souvent avec ce genre de pièce que l’on apprend son métier parce qu' il faut aller chercher le public, il faut être vraiment présent, il faut être bon. Et puis moi je suis assez lent, j’ai un processus de maturation assez important …
Comme un bon vin ?
Moi je crois au bon vin…Je crois au temps qui passe. Je sais que ce n’est pas une vertu moderne, cela n’est pas à la mode. C’est un principe naturel, tout ce qui dure longtemps se construit patiemment. Donc le temps qui passe ne me fait pas du tout peur, et j’ai bien aimé avoir des années de galère, d’apprentissage, sans faire pleurer dans les chaumières puisque c’est un métier que j’ai choisi, donc il n’ y a pas à pleurer, mais des fois je me demandais quand j’allais manger, il m’arrivait d’être vexé en me disant : mince personne ne me désire, il y a 3 réservations…J’ai adoré cette période qui reviendra certainement parce que c’est cyclique. Là, j’ai de la chance d’avoir un spectacle qui plait beaucoup, il y a du monde, j’ai passé une saison extraordinaire au théâtre l’Archipel…
Et là, c’était l’avant dernière ?
Oui, c’était l’avant dernière.
Et la dernière dans moins d’une heure ?
Oui, c’est cela. Le samedi j’enchaine 2 représentations à 17 heures et à 20 heures, et comme celle de 20 heures est toujours complète, on rajoute celle d’avant. Oui, le samedi c’est fatiguant.
Bien. Pouvez-vous développer à la manière de Fabrice Lucchini la phrase clé de notre site Humanvibes qui est : "Vous êtes votre seul atout. Pour réussir vous devez changer. Maintenant. "
(Olivier Sauton s’exprime en totale improvisation comme Fabrice Luchini avec sa fameuse gestuelle à ma plus grande joie, ndlr). Bah, là il y a la phrase de François Hollande le changement c’est maintenant. Humanvibes a compris le coté on va bien se mettre avec la gauche, on va patiner avec le pouvoir, comme ça on va peut-être avoir des subventions, pourquoi pas nous ?
Ah, j’espère oui !
Les socialos sont de retour, ils vont ouvrir le budget de la culture. C’qui est une erreur énorme ! Faut pas croire que les socialos aident la culture, ça c’est totalement faux. Ils sont toujours là dans les, dans les garden party ou générales de théâtre, mais c’est parce que il y a des pt’its fours ! Hein, c’est la gauche pt’its fours ! Mais faut pas croire que la gauche donne énormément d’argent à la culture, c’est faux, c’est totalement faux. Quand on va en tournée d’ailleurs, on se rend compte que les mairies de gauche bah, sont pas les meilleures hein, pour donner de l’argent au théâtre.
Mais la phrase elle est géniale Humanvibes, parce que c’est une phrase qui donne envie…T’as envie d’accomplir quelque chose, c’est une phrase d’espoir, t’as envie d’cliquer, t’as envie d’cliquer sur le site, t’as envie de dire voilà (en tapant des mains, ndlr) ça me donne de la pèche, la vie n’est pas totalement déprimante comme, comme le moral français aujourd’hui , le moral de ce pays est hallucinament…bas, c’est totalement…c’est totalement déprimant aujourd’hui d’être français. Alors que Humanvibes, avec un titre très français, Humanvibes a compris qu’on va relever ce pays, on va donner de l’espoir, et…c’est presque la phrase de La Fontaine dans la fabuleuse fable "Le Chartier embourbé", aide-toi, le ciel t’aidera ! Aide-toi, le ciel t’aidera !
C’est exactement cela, merci Monsieur Luchini ! (s’adressant de nouveau à Olivier Sauton, ndlr). Après ce que vous avez apporté à la notoriété de Fabrice Luchini, ne trouveriez vous pas normal que ce dernier vous renvoi l’ascenseur en créant le spectacle "Olivier Sauton et moi" ?
Ahh ahh (rires) Non, très sincèrement, déjà Fabrice Luchini n’a vraiment pas besoin de mon modeste spectacle, ni pour être encore plus connu, ni pour être encore plus aimé. Non, c’est à lui que je dois tout, tout, tout….Enfin à lui…Il y a aussi mon professeur de théâtre Jean-Laurent Cochet qui a été aussi celui de Luchini. Parce que les gens l’ignorent, mais Fabrice Luchini est une version médiatique de Jean-Laurent Cochet .Tout ce que dit Fabrice Luchini a été professé par Jean-Laurent Cochet . Si un jour Fabrice Luchini fait un spectacle "Olivier Sauton et moi"…Non je ne peux même pas l’envisager…C’est absolument impossible…
Alors, imaginons juste par quoi commenceraient les premières phrases du spectacle « Olivier Sauton et moi » dit par Fabrice Luchini ?
(Olivier Sauton de nouveau en Fabrice Luchini après réflexion, ndlr) Il était une fois…une histoire vraie qui a réellement existé. La naissance d’un jeune homme, d’un jeune comédien, grâce au vieux comédien qu’ je suis…Je lui ai transmis le flambeau…Il en a bien hérité. Maintenant on va jouer tous les deux ensembles. Voilà… j’aimerais bien que ce soit cela.
Très bien, parfait. Vous avez créé votre école de théâtre "le cours Sauton". Est-ce que la transmission est importante pour vous ?
Primordiale ! Primordiale parce que sans mes cours de théâtre que je donne depuis 8 ans…Il y a beaucoup de gens du métier qui font profs pour avoir des cachets et arrondir les fins de mois. Quand on est professeur, on a la passion d’enseigné ce qu’on aime sinon il ne faut pas professer. Sinon on ne va pas enseigner, on va assommer. Moi quand j’avais 20 ans, je suis allé au cours de Jean-Laurent Cochet, j’ai pris une claque énormissime ! Je n’avais pas lu un bouquin, je n’étais pas du tout cultivé, et ce professeur m’a donné l’envie de lire, et m’a donné les outils pour décoder les grands auteurs, ne jamais les intellectualiser, ou verser dans le symbolisme, non, en les voyant très naturellement. Et je ne pouvais imaginer que tout modeste que je suis, garder cette claque pour moi. Non, cette claque il fallait que je la transmette à d’autres.
Donc sans ce cours, je n’aurais jamais pu écrire le spectacle tel qu’il est écrit, dont le sujet est la transmission. Et je me suis rendu compte que plus je professe, plus je progresse moi-même en tant que comédien. Quand on fait la leçon aux autres, si on a un peu de scrupules…cela nous oblige à être exemplaire. On se dit : ça je lui dis à l’élève, mais en fait je ne le fait pas toujours. Et bien si on lui dit, on doit le faire. Je me méfie énormément des professeurs de théâtre qui professent sans ne plus jouer sur scène. Non. Quand on fait la leçon, on doit montrer l’exemple. Etre professeur de théâtre c’est presque facile si on du bagou et de la tchatche, si on a en face de nous des gens qui sont en quête de quelque chose, c’est facile de les manipuler.
C’est assez facile de faire des cours à 2 balles. Une fois qu’on est sur scène, là les élèves vont voir si vous êtes bon ou pas, tout de suite. Donc pour moi c’est très important, d’ailleurs si un jour je n’ai plus que 2 élèves, je continuerais à enseigner, parce que je fais autant, c’est même assez égoïste, autant pour eux que pour moi. J’en ai extrêmement besoin , je me donne des cours à moi-même, c’est mon entretien. Les comédiens, c’est le seul métier d’interprétation où il ne foutent plus rien un fois sortis de l’école, tous les plus grands danseurs étoiles continuent tous les matins à faire leurs exercices à la barre, sinon leurs corps rouillent et ils se cassent la gueule sur la scène de Garnier. Tous les grands pianistes virtuoses dans la musique classique font leurs gammes pour ne pas que leurs doigts s’engourdissent tous les jours. Le comédien, lui, c’est le seul interprète qui ne fout rien , il ne fait pas ses exercices de diction, de respiration, alors il dit : j’observe les gens. Non. Tu glandes, arrête. Mon cours de théâtre c’est aussi mon hygiène qui me permet de me faire progresser en fait.
Bien. Il se trouve que les personnalités que l’on a interviewées, posent une question à notre demande à la personne suivante. Dans ce cas présent, c’est Shaun le mouton, que l’on avait interviewé pour la sortie de son film le 01/04 dernier, et dont vous retrouverez l’interview sur le site, qui s’adresse à vous : Olivier, pourriez vous jouer avec un mouton sur scène, ou plus généralement avec des animaux ?
Ohh ! Les animaux comme les enfants sont les meilleurs comédiens, donc je sais que je me ferai voler la vedette. C’est simple, sur scène vous mettez un acteur et un chat ou un chien, tous les gens vont être fixés sur les animaux.
Alors il faut vous déguiser en animal ?
Euhh…Cela ne me dérengerait pas ! J’adorerai jouer avec des animaux, je suis un fan. J’ai 2 gros chats chez moi, des Maine-Coon qui m’ont couté une fortune, si bien que je ne suis pas parti en vacances depuis 4 ans à cause d’eux. Ce sont des chats d’exposition qui sont les êtres vivants à qui je parle le plus, je ne plaisante pas.
Vous répétez devant eux ?
Et bien figurez vous que je n’ai pas le droit de tout dire, parce que c’est un contrat entre ma chatte préférée, qui s’appelle Marla, à qui je parle beaucoup de mon métier, de mes spectacles, et elle m’a donné une form… – j’ai l’air complètement dingue – elle m’a donnée une formule magique, qui fait que grâce à cela je ne stresse plus du tout sur scène…je ne plaisante pas, mais je ne peux pas en dire plus, ce n’est pas une blague.
Mais il n’y a pas de soucis, vous pouvez la garder secrète ! Maintenant c’est à vous de poser la question à la personne qui sera interviewée prochainement. Et nous accueillerons dans ce cadre la romancière Catherine Siguret dont le livre "Le mouton de la place des Vosges" vient de sortir. Vous la connaissez peut-être ?
Non, je ne connais pas les auteurs contemporains, je suis plus dans les classiques.
Alors Catherine Siguret a été "nègre littéraire" pendant plusieurs années, et a fini par se dévoiler dans un livre "Enfin nue"où elle fait nous part de ce métier de l’ombre. Mais ce qui m’a interpellé chez elle, c’est qu’elle a sortit "Le mouton de la place des Vosges" alors que l’on venait juste de finir d’interviewer Shaun le mouton.
Très bien. Est-ce que vous préférez que votre texte soit lu à haute voix, où soit lu avec une voix intérieure. Et si quelqu’un jouait votre roman, quel comédien ou comédienne choisisseriez-vous ?
Alors, avez-vous pensé à éditer le texte de votre spectacle ?
Nous sommes en pourparlers avec 2 maisons d’éditions parce qu’il a pas mal de personnes qui sont intéressées, ce qui me flatte beaucoup. Nous avons déjà une proposition, l’autre ne devrait pas tarder, et si cela devait ce faire ce serait pour la rentrée où plus vraisemblablement d’ici à la fin de l’année.
Pour les fêtes de Noël, ce serait un superbe cadeau !
Oui, ce serait génial ! Une des maisons d’éditions est une des plus importantes dans le registre théâtral, nous serions distribués à la FNAC et un peu partout.
Ce serait vraiment une très bonne idée, cela permettrais de prolonger votre spectacle de manière extraordinaire !
Exactement, je serai très heureux, et cela ne serait pas un objet dérivé comme un porte clé ou autres. Et quelle satisfaction pour moi de voir dans une librairie, ou dans un bibliothèque d’une personne un texte que j’ai écrit. J’ai tellement une fascination pour les livres, que si un jour je devenais "un livre", ouahhh !
Bien, et pour finir dernière question, et n’allons pas par 4 chemins empruntés par les 4X4. Comme le dirait Fabrice Luchini, qui je le rappelle habite à 4 pas d’ici, mais qui n’est pas Bac plus 4, hein, on ne va plier les cheveux en 4, mais qui en revanche a de l’esprit comme 4, il est temps de vous dire vos 4 vérités avant de partir aux 4 coins du monde en avion, mais pas à 4 pattes : Fabrice Luchini sort du corps d’Olivier Sauton !!
Est- ce qu’il pourrait sortir du corps d’Olivier Sauton ?? Moi j’aime bien le retenir…J’aime bien le remettre à sa place… (Fabrice Luchini reprend la parole,ndlr)… Même si il veut toujours déborder, là Olivier tu vas te calmer, moi là j’ai plus de 60 ans, j’ai à peu près 40 ans de métier, toi t’es un enfant, t’as quoi ? T’as 10, 12 ans de métier ? Bon bah voilà. On a l’âge de son métier hein, on a l’âge de son métier… donc je crois que Sauton il a encore besoin de ce tuteur qui est Fabrice Luchini. Faut surtout pas que Sauton fasse le coté Luchini low cost, voilà, il va pas faire Luchini toute sa vie Sauton, mais c’est un bon tremplin, et puis c’est une bonne idée. Et puis l’idée c’est quand même qu’un jour Sauton…bah que Sauton ne soit pas l’égal de Luchini, on ne va pas être prétentieux comme ça, mais oui, qu’il vole de ses propres ailes, au moins je l’aurais aidé à décoller…
Et bien Olivier Sauton, je vous remercie.
Propos recueillis le samedi 13/06/15 dans la loge d’Olivier Sauton entre 2 représentations au théâtre l’Archipel, avec un retour dans ce même lieu en Septembre 2015.
NDLR : Le texte du spectacle est maintenant disponible aux editions L'Arche / 220516
Dédicace d'Olivier Sauton pour Humanvibes :
Et pour aller plus loin :
Passage d'Olivier Sauton à l'émission "Vivement Dimanche" de Michel Drucker le 02/11/14.
Vivement Dimanche(2014) – Olivier Sauton – Youtube
Remarquable interview du comédien Jean-Laurent Cochet par TAT (2013)
Jean-Laurent Cochet (2013) – TAT – Dimitri de Larocque – Youtube